Dans Beyrouth-sur-Loire, l'intrigue policière y est secondaire et s'efface devant les rapports de force entre personnages, sur fond de réalité sociale aux allures de poudrière de la France de ce début de vingt et unième siècle. Beyrouth-sur-Loire peut être envisagé comme un polar politique, au sens grec du terme. La véritable intrigue, c'est cette politikè, et le cadavre, celui de cette ville qui meurt lentement. D'ailleurs, si le lieutenant Jeddoun est un dur-à-cuire à l'ancienne, empruntée à l'école il est trop ambigu pour être considéré comme un héros et ses échecs sont révélateurs : son temps est révolu. Il n'est plus qu'un pion, perdu au milieu du no man's land urbain où les ego se sont placés en embuscade, comme autant de snipers du cynisme ambiant. C'est désormais l'heure du chacun pour soi, et même pas Dieu pour tous, car la transcendance y brille surtout par son absence. Difficile de trouver une figure qu'on pourrait ranger d'emblée du côté du Bien.
Printemps 2016.
Le commissaire de Police Antoine Carpentel est surnommé le « Marshal ». Violent et corrompu, l’homme règne par la peur et les armes, dans le sillage du maire Louis Berthomier, son beau-père. Unis par un ancien pacte, les deux hommes ont fait taire toute contestation dans une ville éreintée par la désindustrialisation et menacée par le repli communautaire.
Quand quarante personnes trouvent la mort dans l’incendie du campement illégal du Maleval, les soupçons se portent aussitôt sur Régis Costes, un militant nationaliste dont le groupe d’extrême-droite s'active depuis plusieurs mois. L’homme pourrait aussi avoir des liens avec le vieil élu gaulliste : des témoins ont reconnu Costes lors des derniers mouvements sociaux à la cimenterie Berthomier, où il est venu jouer les briseurs de grève.
Chargée de l’enquête sur l’affaire du Maleval, le capitaine de gendarmerie De Rambert devra composer avec cette ville à l’agonie. Cette femme d'action, pressentie pour être la première à diriger le fameux Groupe d'Intervention, va surtout devoir se mesurer au cynique « Marshal » sur son propre terrain, et la rivalité pourrait rapidement déboucher à une véritable guerre des polices. La chasse à l’homme peut débuter, mais dans cette ville rongée par le manque d’avenir et le chômage de masse, les cartes sont tellement brouillées et les appétits si féroces qu’il va très vite devenir difficile de distinguer qui veut dévorer qui…