Je l'imagine. Brune comme une héroïne romantique. Ardente et intense. Flora Tristan. Sa rencontre a marqué ma vie. Son histoire dans l'Histoire est un roman. Née à Paris en 1803, de mère française et de père péruvien, elle s'embarque - seule femme à bord, quatre mois en mer et le cap Horn en prime - pour faire valoir ses droits auprès de sa riche famille paternelle qui l'a abandonnée. Au Pérou, elle découvre la passion, la violence et l'esclavage. Autodidacte, elle écrit à son retour Pérégrinations d'une paria. Jaloux de son succès, son mari lui tire une balle dans le dos, qui restera fichée à deux doigts de son coeur. Prophète et amoureuse, cette aventurière de l'absolu a inventé son destin. Flora Tristan est la première femme à lire dans la révolution industrielle anglaise l'avenir de la France. La première à établir un lien entre socialisme et féminisme. La première à entreprendre un épuisant tour de France pour unir la classe ouvrière et libérer les femmes. Elle n'est pas notre contemporaine. Flora Tristan nous devance.
Pour Elvire, il n'était que New York. Manhattan et son panorama de gratte-ciel qui vous donne le vertige. Vertigo habituel depuis qu'elle essaie de vivre pour deux, associant à ses propres rêves, Marie, sa sueur, immobile, nouée par la paralysie. Pour Alassane aussi, seul comptait le Nouveau Monde.Oublier les terreurs, les humiliations, le sordide. Oublier qu'il était Africain. Aussi quand Elvire l'engage comme chauffeur, il cesse de craindre, il s'attache à Marie avec la complicité de ceux qui ne peuvent s'exprimer. Pourquoi faut-il qu'Elvire s'acharne à tout détruire? A commencer par elle-même. Accrochée à la souffrance de sa sueur, aliénée par sa passion aussi brutale que soudaine pour Alassane, elle n'est plus que revanche et fureur d'amour. En creux, en soif, en manque. Mutilée. Tel l'Ange déchu…
"Elle n'est pas seulement laide, ma pauvre petite fille, elle est sans grâce, c'est pire." En surprenant cette phrase dans la bouche de sa mère, Isabelle a cru mourir. Hier encore, c'était une enfant heureuse qui n'avait . que tendresse pour tout de que la vie lui donnait: un père bon et doux, une mère si belle, la grande maison face à l'océan son ami... A son bonheur détruit, à la vérité qui la frappe comme une malédiction, Isabelle survivra métamorphosée, méconnaissable, a.dulte soudain. Impitoyablement lucide, elle découvre les secrets et les tares de ceux qu'elle aimait, durement hostile, elle n'est plus que volonté de vengeance et de domination. Est-elle à jamais enfermée dans osa disgrâce?
LE JARDIN DES ABSENTS
II y a le soleil, la mer, les maisons aux ocres juteuses, les musiques et les danses. Ce pourrait être un village de vacances. Il s'en faudrait de très peu... Et c'est là, au bout du monde, que Joden se réveille un matin. Que lui est-il arrivé ? Est-il fou ? Malade ? et qui hurle à voix basse au fond du jardin ? Sans rivage et sans mémoire, Joden se débat dans l'angle mort de sa vie. Alors, survient Agna qu'il n'a jamais cessé d'aimer. Elle est désormais son seul lien avec le passé, mais, changée et meurtrie par les épreuves, acceptera-t-elle de se sauver avec lui ? Autour d'eux, des hommes et des femmes jouent à s'aimer et s'inventent un passé glorieux sous le regard impassible des gardiens. La parade sociale, dérisoire et nostalgique, ne sert qu'à masquer la vacance des esprits et des cœurs. Pour quelle faute tous ces hommes doivent-ils subir un éternel été de paresse et d'oubli ? Ainsi qu'une enquête policière, le récit progresse avec une logique implacable de découverte en découverte au rythme de Joden, de ses expériences et de ses tentatives d'évasion. Ce climat à la fois tragique et sensuel provoque un étrange malaise. Sont-elles vraiment si rares ou si lointaines, ces prisons du plaisir, de l'irresponsabilité ou de l'oubli ? Et, certains matins, ne nous réveillons-nous pas comme exilés de nous-mêmes ?